12 mars, annonce par les États-Unis d’une taxe de 25 % sur l’acier et l’aluminium. 2 avril, annonce de nouveaux droits de douane de 20 % sur toutes les marchandises en provenance de l'UE. 9 avril, suspension pour 90 jours des taxes dites réciproques, hormis pour la Chine dont les produits demeurent taxés à… 125 %. Au vu de l’histoire économique, cette escalade sans précédent récent dans les tensions commerciales à l’échelle de la planète annonce une guerre sans vainqueur…
Quand bien même elle se cantonnerait aux États-Unis et à la Chine, cette guerre pourrait réduire de « jusqu'à 80 % le commerce de marchandises entre les deux premières économies du globe et effacer près de 7 % du PIB mondial sur le long terme » a prévenu l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce).
Quand on sait que les USA sont le premier marché d’exportation pour l’UE (avec 19,7 % de ses exportations) et qu’ils sont le deuxième fournisseur de l’UE (avec 13,7 % des importations), on comprend que cette guerre commerciale d’un autre temps ne sera pas sans effet sur notre activité économique.
Car, si l’on pense bien sûr à l’aéronautique et au spatial, il faut naturellement penser également aux produits agricoles et agroalimentaires (vins et spiritueux, fromages, élevage, foie gras…) « made in Occitanie » pour lesquels le marché nord-américain est un débouché important. Car ces filières sont souvent déjà fragilisées par un certain nombre de difficultés.
On a coutume de rappeler que les Chinois -dont l’UE sera peut-être amenée à se rapprocher davantage dans le futur- ont construit le mot « crise » en associant deux idéogrammes signifiant danger et opportunité. Cette dualité est le quotidien des chefs d’entreprise. Mais, dans un monde qui semble tourner le dos à toutes les pratiques en vigueur depuis 1945, une mise à jour de notre logiciel de pensée économique est incontournable et urgente.
C’est grâce à cet « upgrade » que de nouvelles alliances pourraient se dessiner prochainement avec des économies comme celles de l’Inde et d'autres pays asiatiques (Indonésie, Philippines, Thaïlande et Malaisie). Et avec le Canada -dont 44 % des habitants pensent d’ailleurs que leur pays devrait adhérer à l'UE- et l’Amérique du Sud.
Cette crise devrait aussi être l’occasion d’accélérer sur le nearshoring qui, par opposition à l’offshoring, doit voir la production des produits et services sensibles se rapprocher des centres de consommation. Plus largement, la mise en cohérence des chaînes d’approvisionnement avec les enjeux de souveraineté, d’empreinte environnementale, de sobriété énergétique… bénéficierait plus à l’avenir des habitants de la planète que ce retour inepte du protectionnisme.
Pour le réseau des CCI, cet indispensable travail de réflexion et de projection doit naturellement se faire en parallèle d’une attention plus soutenue que jamais au moteur de l’économie des territoires : les TPE/PME qui représentent 95 % de nos entreprises.
Jean-François Rezeau, Président de la CCI Occitanie
Ce sujet de la réindustrialisation au service de notre souveraineté, de notre balance commerciale, de la transition écologique… est abordé dans le Dossier Spécial Réindustrialisation du magazine Entreprises à la Une coédité par la CCI Occitanie et paru le 16 avril. À découvrir ICI.