La rupture conventionnelle permet à l'employeur et au salarié en CDI de convenir d'un commun accord des conditions de rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle peut être individuelle ou collective. Elle doit préciser les conditions d'indemnisation du salarié suite à la rupture de son contrat. Une procédure légale fixe les démarches à respecter. Une convention de rupture doit être rédigée. Elle doit être obligatoirement validée par la DREETS.
La rupture conventionnelle a 15 ans, en synthèse voici les principaux cas de jurisprudence :
Situation | Références | Contexte résumé de la rupture conventionnelle |
Harcèlement moral |
Cass. soc., 30 janv. 2013, n° 11-22.332, 165 FS - P + B + R
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Une rupture conventionnelle signée dans un contexte de harcèlement moral peut être annulée. C'est la solution retenue pour une salariée en ayant signé une RC à son retour d'arrêt-maladie et dont la fragilité psychologique avait été attestée par certificat médical.
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En conflit avec l'employeur | Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.865, 934 FS - P + B + R | L'existence d'un différend entre le salarié et l'employeur ne les empêche pas de conclure une rupture conventionnelle, si le consentement du salarié est libre et éclairé. L'employeur lui avait proposé ce mode de rupture pour « ne pas ternir la suite de son parcours professionnel » : les juges ont considéré qu'il avait fait pression sur le salarié, dont le consentement était alors vicié. |
En longue maladie | Cass. soc., 30 sept. 2013, n° 12-19.711 | Une rupture conventionnelle avec un salarié absent pour longue maladie est possible si son consentement est libre et éclairé. |
Existence d'une sanction préalable | Cass. soc., 15 janv. 2014, n° 12-23.942, 75 FS - P + B | Un salarié est sanctionné en raison de la mauvaise qualité de son travail. La situation n'évoluant pas, l'employeur finit par lui proposer une rupture conventionnelle. La Cour de cassation valide. |
Déclaré apte avec réserves à la suite d'un arrêt pour accident du travail | Cass. soc., 28 mai 2014, n° 12-28.082, 1070 FS - P + B | Une rupture conventionnelle avec un salarié déclaré apte avec réserves à la suite d'un arrêt pour AT est valable si son consentement est libre et éclairé et qu'aucune fraude de l'employeur n'est établie. |
Avec un contrat de travail suspendu | Cass. soc., 30 sept. 2014, n° 13-16.297, 1668 FS - P + B + R | Une rupture conventionnelle est possible en cours de suspension du contrat de travail due à un AT/MP. Le salarié avait repris le travail sans visite de reprise, pourtant obligatoire. Juridiquement, le contrat était toujours suspendu. |
Suite à un licenciement ou à une démission | Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13-20.549, 389 FP - P + B | Sauf vice du consentement, une rupture conventionnelle peut être signée après une démission ou un licenciement, auquel elle emporte renonciation. |
Avant engagement de poursuites disciplinaires | Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13-23.348, 391 FP - P + B | Une rupture conventionnelle signée avec un salarié fautif n'interrompt pas le délai de prescription. S'il se rétracte, l'employeur peut engager une procédure disciplinaire, pour autant que le délai ne soit pas dépassé (2 mois à partir du jour où il a eu connaissance des faits). |
En congé de maternité | Cass. soc., 25 mars 2015, n° 14-10.149, 512 FS - P + B | Possibilité de conclure une rupture conventionnelle avec une salariée en congé maternité et durant les 4 semaines suivant son retour. |
Déclaré inapte suite à un accident du travail | Cass. soc., 9 mai 2019, n° 17-28.767, 703 FS - P + B | Il est possible de conclure une convention de rupture avec un salarié déclaré inapte à son poste à la suite d'un accident du travail, sauf cas de fraude ou de vice du consentement, ce que le salarié devra démontrer. |
Contenu de la convention de rupture | ||
Renonciation à tout recours | Cass. soc., 26 juin 2013, n° 12-15.208, 1212 FS - P + B + R | Une clause conventionnelle par laquelle les parties renoncent à tout recours ultérieur est nulle mais la convention de rupture reste valide. |
Erreur sur le délai de rétractation | Cass. soc., 29 janv. 2014, n° 12-24.539, 207 FS - P + B | L'erreur, dans la convention de rupture, sur le délai de rétractation (normalement de 15 jours) n'affecte pas sa validité, pour autant que cette erreur n'ait pas vicié le consentement des parties. |
Contact du salarié avec Pôle Emploi | Cass. soc., 29 janv. 2014, n° 12-25.951, 213 FS - P + B | Ne pas informer le salarié de la possibilité dont il dispose de contacter Pôle emploi sur son parcours professionnel n'affecte pas la validité de la convention, sauf si le consentement du salarié a été vicié par cette négligence. |
Assistance du salarié par un conseiller extérieur | Cass. soc., 29 janv. 2014, n° 12-27.594, 215 FS - P + B | Faute d'institution représentative du personnel, et si cette omission n'a pas vicié son consentement, ne pas informer le salarié de la possibilité dont il dispose de se faire assister par un conseiller extérieur à l'entreprise n'affecte pas la validité de la convention. |
Date de rupture et montant de l'indemnité | Cass. soc., 8 juill. 2015, n° 14-10.139, 1210 FS - P + B | Une convention fixant une date de rupture antérieure à la date d'homologation et une indemnité de rupture inférieure à l'indemnité légale n'est pas nulle. Le juge doit rectifier la date de rupture et prononcer une condamnation pécuniaire à l'encontre de l'employeur. |
Renonciation à la clause de non-concurrence | Cass. soc., 6 févr. 2019, n° 17-27.188 | La renonciation de l'employeur à appliquer une clause de non-concurrence ne se présume pas et doit être explicite. Une clause libératoire contenue dans la convention de rupture et indiquant qu'à compter de sa signature, le salarié reconnaît que toutes les sommes qui lui étaient dues lui ont été versées, ne suffit pas à libérer l'employeur de la clause de non-concurrence. Il faut que la possibilité de renonciation soit prévue par la clause de non-concurrence elle-même, dans un délai éventuellement fixé par la convention collective applicable. |
Procédure applicable | ||
Remise d'un exemplaire de la convention au salarié |
Cass. soc., 6 févr. 2013, n° 11-27.000, 214 FS - P + B + R
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Un exemplaire de la convention de rupture doit être remis au salarié. Cela est nécessaire pour établir que son consentement est libre et éclairé et qu'il pourra exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause. A défaut, la convention est nulle et la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le seul fait que la convention de rupture mentionne qu'elle a été établie en deux exemplaires ne permet pas de présumer que l'un d'eux a effectivement été remis au salarié ait été établie en deux exemplaires. En cas de litige, ce n'est pas au salarié de démontrer qu'aucun exemplaire ne lui a été remis. Après la signature de la convention de rupture, l'employeur a donc tout intérêt à lui faire attester qu'un exemplaire lui a été remis, soit sur un document à part soit par une mention sur la convention de rupture elle-même. |
Date de signature de la convention | Cass. soc., 3 juill. 2013, n° 12-19.268, 1275 FS - P + B + R | La loi ne fixe aucun délai entre l'entretien et la signature de la convention de rupture. Dès lors que le consentement du salarié est bien libre et éclairé, les deux peuvent intervenir le même jour. |
Délai d'instruction | Cass. soc., 16 déc. 2015, n° 13-27.212, 2206 FS - P + B | Il y a homologation tacite dès lors qu'aucune réponse de l'administration n'est parvenue aux parties avant l'échéance du délai d'instruction. Une décision de refus d'homologation réceptionnée après l'expiration du délai d'instruction est donc sans effet, même si elle a été prise avant la fin de ce délai. |
Délai de rétractation |
Cass. soc., 14 janv. 2016, n° 14-26.220, 86 FS - P + B)
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Une demande d'homologation adressée à la DREETS avant la fin du délai de rétractation n'est pas valable : la rupture conventionnelle ne peut être homologuée. Si cette demande a néanmoins été tacitement homologuée par la DREETS, le salarié peut réclamer des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le délai de rétractation de 15 jours calendaires dont disposent les parties à compter de la signature de la convention de rupture a été respecté s'apprécie à la date d'envoi de la lettre de rétractation et non sa date de réception : ainsi, si la lettre est expédiée au cours de ce délai, mais réceptionnée après que celui-ci a expiré, la rétractation est valable. Cela vaut que la rétractation soit à l'initiative du salarié ou à celle de l'employeur. |
Remise des documents de fin de contrat | Cass. soc., 6 juill. 2016, n° 14-20.323 | Tant que la rupture conventionnelle n'est pas homologuée, l'employeur ne peut remettre au salarié les documents de fin de contrat : « s'analyse en un licenciement non motivé, le fait pour l'employeur d'adresser au salarié, sans attendre la décision relative à l'homologation, une attestation Assedic et un solde de tout compte ». |
Homologation | Cass. soc., 12 mai 2017, n° 15-24.220, 812 FS - P + B | La DREETS peut dans un premier temps refuser d'homologuer une convention de rupture puis, finalement, changer d'avis et l'homologuer. Selon la Cour de cassation, une décision de refus d'homologation d'une convention de rupture ne crée de droits acquis ni au profit des parties à la convention, ni au profit des tiers ; une telle décision peut, par suite, être légalement retirée par son auteur. |
Assistance de l'employeur | Cass. soc., 5 juin 2019, n° 18-10.901, 895 FS - P + B |
La signature d'une convention de rupture doit être précédée d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié et l'employeur peuvent se faire assister (C. trav., art. L. 1237-12).
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L'exemplaire de la convention remise au salarié doit être signé par les deux parties | Cass. soc., 3 juill. 2019, n° 17-14.232, 1085 FS - P + B | Pour la Cour de cassation, cette formalité est substantielle car seule la remise d'un exemplaire signé par les deux parties permet au salarié de demander l'homologation de la convention et, le cas échéant, d'exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause. |
Rupture conventionnelle et salarié protégé | ||
Autorisation préalable | Cass. soc., 15 mai 2019, n° 17-28.547, 785 F - P + B |
Conclure une rupture conventionnelle avec un représentant du personnel doit être autorisé par l'inspecteur du travail et non homologué par la DREETS comme pour les autres salariés (C. trav., art. L. 1237-15)
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Source : Editions Législatives