Christophe Jacques a rejoint la CCI Occitanie en mai dernier en tant qu'ingénieur conseil en gestion de l'eau. Il va mettre son expertise et son expérience au service du réseau et des entreprises. Il nous en dit plus sur sa vision des enjeux autour des ressources en eau et sur sa mission qu'il partage entre l'Occitanie et la Nouvelle-Aquitaine.
Pouvez-vous vous présenter et nous dire quelques mots de vos origines et de votre parcours ?
Christophe Jacques : J’ai 41 ans, je suis né à Agen et ai grandi au Pays basque. Je suis donc un pur produit du Sud-Ouest, où j’ai ma famille et mes attaches. J’ai un profil scientifique puisque j’ai fait une école d’ingénieur à Poitiers, section traitement de l’eau et des nuisances, où j’ai obtenu mon diplôme en 2006.
De 2006 à 2010, j’ai travaillé dans un grand groupe spécialiste de l’eau où je suis plus spécialement intervenu sur ce que l’on appelle le traitement des eaux de process industriels, j'ai poursuivi ma carrière dans une entreprise spécialisée dans le traitement de l’eau au point d’usage, en tant que technico-commercial puis comme responsable commercial chez un maître d'oeuvre intervenant sur des projets industriels dans le domaine de l’énergie et de l’eau.
De 2022 à 2024, je suis revenu dans le traitement des eaux à un poste d’ingénieur projets industriels et, depuis le 2 mai de cette année j’ai le plaisir d’être Ingénieur Conseil en gestion de l’eau pour les CCI Nouvelle-Aquitaine et Occitanie.
Quel regard portez-vous sur le fait que les CCI des deux plus grandes régions de France s’emparent à bras-le-corps du sujet de l’eau en créant un poste de « Monsieur Eau » ?
CJ : C’est très positif et cela traduit le fait que le sujet préoccupe de plus en plus les entreprises, que les problèmes de disponibilité de la ressource en eau impactent de plus en plus concrètement leur développement et que, donc, elles se posent de plus en plus la question de leur pérennité face à cette problématique.
Le sujet du traitement des eaux est inévitablement technique et les entreprises ont besoin de conseils objectifs et d’assistance dans ce domaine. La création de ce poste vient donc de la volonté des CCI Nouvelle-Aquitaine et Occitanie d’apporter une réponse aux besoins des entreprises et au constat que le réseau, s’il dispose d’une large palette d’expertises, a besoin de support dans cette expertise.
Ce poste a été monté avec l’Agence de l’Eau Adour-Garonne, qui finance 80 % du poste et qui souhaitait avoir un référent technique eau pour le monde des entreprises comme il en a un pour l’agriculture par exemple. Dernière précision, la mutualisation de cette fonction entre les deux régions s’explique par une logique hydrographique, qui est à la base du dimensionnement territorial de l’Agence de Bassin Adour-Garonne.
Quelles sont vos missions au sein de la CCI Occitanie et comment vous intégrez-vous dans l’organisation du réseau des 13 CCI de notre région ?
CJ : Je suis là pour aider mes collègues et être en support des CCI territoriales. Un de mes objectifs est d’amener du contenu et de la formation aux conseillers territoriaux du réseau pour, le cas échéant, leur amener des compétences supplémentaires. Je n’ai rencontré qu’une partie de mes interlocuteurs mais j’ai pu mesurer que certains d’entre eux avaient d’ores-et-déjà une appétence, un historique et des compétences.
C’est cette complémentarité que la CCI Occitanie va mettre au service du réseau et des entreprises de notre région. En clair, je vais intervenir en soutien des conseillers territoriaux avec qui je souhaite travailler main dans la main, notamment en les accompagnant sur des rendez-vous en entreprises, des visites terrain, des rencontres d’entreprises ou l’organisation d’évènements … Le mot de « coordinateur » utilisé par l’Agence de l’Eau pour définir le poste qualifie parfaitement la logique de celui-ci.
Face à l’importance des enjeux, nous avons tous un rôle à jouer au sein du réseau comme à l’extérieur. À ce sujet, la question du financement des opérations « terrain » (comme un diagnostic eau) qui se feront par la suite sera commune à tous les territoires. Tout le monde a son rôle à jouer !
L’économie des deux régions présente des similitudes (agriculture, viticulture, aerospace, tourisme…). L’Occitanie présente-t-elle des spécificités, lesquelles et quelles en sont les enjeux ?
CJ : La spécificité la plus évidente de l’Occitanie, c’est qu’elle connaît déjà l’impact du réchauffement climatique et de sa conséquence sur la ressource en eau. Elle est impactée de façon plus marquée que toute autre région, en particulier pour tous ses départements autour de l’arc méditerranéen. Ici, plus encore qu’en Nouvelle Aquitaine, on ne parle pas d’une menace mais d’une réalité. Elle est donc obligée d’aller plus vite dans la conception et la mise en œuvre de solutions qui, pour être efficaces, doivent être décidées en commun et acceptées par tous.
La solidarité et le partage s’imposent car l’eau, contrairement à l’énergie, on ne peut pas la créer. Le seul levier, c’est la disponibilité de la ressource et les usages que l’on va en faire. Les industriels que nous allons accompagner ne peuvent créer la ressource : ils sont majoritairement tributaires de cette ressource que la nature et les distributeurs d’eau mettent à leur disposition.
C’est pour cette raison que le monde de l’entreprise, et plus particulièrement les industries, va devoir s’ouvrir à ses voisins : les autres entreprises, le monde agricole, les collectivités… Certaines choses existent déjà avec des passerelles de valorisation d’eaux usées à l’échelle d’un territoire entre le monde agricole et l’industrie, les collectivités et les industries… C’est tout cela que l’Occitanie, en avance de phase par rapport à d’autres régions, va devoir imaginer et déployer de façon urgente. L’avenir de son économie et de ses habitants en dépend.
La température a augmenté de 5 degrés en un million d’années et de 1,5 degré en 100 ans (3,5 si la trajectoire COP est maintenue). Comment travaille-t-on avec optimisme sur une fonction comme la vôtre ?
CJ : Notre pays a de nombreuses compétences et des experts formidables : il est temps de les écouter ! Le sujet est plus que sérieux, c’est vrai, mais nous sommes loin de la situation hydrique d’Israël ou de l’Andalousie par exemple.
Nous avons encore de la ressource, nous avons un vrai savoir-faire : tout reste possible mais tout est à construire, à repenser. Il faut absolument « casser » nos habitudes…A nous de transformer ce défi en opportunité en procédant différemment, avec de l’inventivité, de la technicité, de la solidarité et de la citoyenneté ! Nous le devons à notre planète et aux générations futures.
Contacter Christophe Jacques : [email protected]